2014 • la grand'combe

Un monument aux morts face à des collégiens

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Le collège Léo Larguier de La Grand Combe, qui accueille le projet mon nom des habitants cet automne 2014, est situé place Jean Jaurès à proximité de la mairie et de l'église, en plein centre-ville. Le nouvel urbanisme de cette place s'appuie sur un choix très simple : le monument aux morts a été déplacé de manière à faire face à l'entrée principale du collège.
Le monument regarde donc maintenant le collège, mais
est-ce qu'un monument aux morts cela regarde les collégiens ?

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septembre-décembre 2014 :  une résidence
En partenariat avec le Conseil Général du Gard, dans le cadre d'une Résidence d'artiste en collège, l'équipe artistique de mon nom des habitants commence un travail avec trois classes du Collège Léo Larguier de La Grand Combe.
Chaque mardi de ce premier trimestre 2014, Laurent Pichaud, accompagné ou non d'un autre membre de l'équipe artistique, rencontrera chacune des classes pour une série d'ateliers artistiques : qu'ils soient chorégraphiques, plastiques, littéraires, photographiques, etc.

Cette résidence s'est mise en place en juillet 2014, ce qui a permis à l'équipe artistique de faire des premiers repérages et de rencontrer les personnels référents du collège, le cabinet de Mr le Maire, la Direction culturelle de la communauté de communes du pays grand-combien et l'adjoint aux anciens combattants. Cette large dynamique municipale permet d'inventer trois temps publics durant lesquels le travail mené avec les collégiens pourra trouver sa place.

 

 

9 septembre 2014 :  les présentations
Cécile Namur, responsable des publics au Centre de Développement Chorégraphique d'Uzès, et Laurent Pichaud viennent lancer offciellement le début de la Résidence au collège. Accueillis par l'équipe administrative et pédagogique, ils mettent en place un planning et précisent les trois projets publics.
Et surtout, ils rencontrent la 6è A, la 6è B et la 3è A qui se lancent dans cette création commune accompagné par leur professeur d'arts plastiques Mr Pascal Robin.

Laurent Pichaud et quelques élèves de la 6è A


Au-delà de la rencontre humaine, des questions et des imaginaires se mettent déjà en place autour de la thématique de la résidence d'artiste :

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On demande à Mr Robin par exemple, sur les indications de certains élèves qui cherchent à se rappeler à quoi ressemble le monument aux morts de leur commune, de dessiner ce monument.
Il est question de :
deux personnages debout
d'un enfant peut-être
d'un corps couché au sol
d'un motard ?
de noms écrits sur un socle...



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On essaye aussi de comprendre ce mot nouveau :
commémorer.
On le découpe en com-mémorer,
que l'on compare à : com-pagnon, celui avec qui on partage le pain (le co-pain),
commémorer, devient partager ensemble un même souvenir

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fin septembre 2014 :  mon nom est

La danseuse et poète Sabine Macher intervient auprès des 3 classes pour des ateliers d'écriture.
Les noms, la présentation, la filiation sont différents axes d'approche qui font produire aux collégiens de courts textes ou enregistrements audio, et ouvrent un imaginaire autour du titre de la résidence mon nom des habitants.

mon nom est que des visages

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Le lendemain, Laurent Pichaud et Sabine Macher ont rendez-vous avec le cabinet du maire de la Grand Combe pour travailler sur les deux livres d'or que la mairie a récupérés. L'un, conçu par la Compagnie des Mines, recense les mineurs morts à la guerre, le deuxième s'attache aux soldats de la Grand Combe et du canton tombés pour la France.
Ce travail de recension permet de préparer la cérémonie du 11 novembre durant laquelle des collégiens seront présents.


mon nom est un livre

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sabine macher

Sabine Macher est venue deux fois au Collège Léo Larguier. En plus de ses ateliers d'écriture, elle a confectionné trois petites œuvres sonores poétiques pour témoigner du vivant du travail avec les collégiens :

un timbre trompète 3è A


tous les noms 6è B

  que des lettres 6è A 



octobre 2014 :  le visible et l'invisible
La résidence est bien lancée et les vacances de la Toussaint arrivent bientôt, plusieurs séances se succèdent.
Les 3 classes sont maintenant au travail sur des sujets et des projets distincts, chaque classe se posant des questions différentes autour de la visibilité des monuments aux morts et de la mémoire des guerres :
— on peut voir les monuments aux morts facilement mais les regarde-t-on ?
— n'y a-t-il pas du flou dans notre mémoire sur ces périodes historiques éloignées d'aujourd'hui ?
— qu'y a-t-il au delà de ce que l'on voit d'un monument aux morts ?
— comment la mémoire de la guerre résonne-t-elle aujourd'hui ?
On sent bien que ces questions tournent autour des notions de visible et d'invisible et on essaye de trouver des formes artistiques pour témoigner de comment ces notions nous travaillent.

•••  la 6è A se lance dans un projet audio :  
je vois / je ne vois pas
Nommer ce que l'on voit et nommer ce que l'on ne voit pas, ou plus. Soit parce que l'on sait ce qui manque à notre vision, soit parce que l'on imagine ce qu'il peut y avoir.
Dans ce travail subtil sur l'imaginaire visuel, on travaille dans différents lieux : en classe, mais aussi ailleurs : comme par exemple à la Maison du Mineur de la Grand Combe où, après une brève visite, on fait un enregistrement audio devant un des bâtiments désaffectés : on voit des murs, des portes fermées, des traces d'utilisation, on ne voit plus ceux qui travaillaient là, leurs outils...
Enregistrement qui servira sans doute à la conférence performée que les artistes Laurent Pichaud et Julien Quartier préparent pour le 8 novembre à la Maison du Mineur.
  
             Un premier travail pictural se met aussi en place :
peindre le flou
Après une enquête photographique sur les monuments aux morts du pays grand combien, on floute les photos des monuments grâce à photoshop et avec de la peinture, on décide de surcharger le flou. L'indistinction entre ce que l'on voit, ce que l'on voit presque et ce que l'on ne voit plus, aide notre regard contemporain à se poser la question de la visibilité des monuments aux morts dans nos villages. Ce travail trouvera sa place lors de l'exposition-installation du 6 décembre dans la salle du conseil de la mairie de la Grand Combe, durant le festival Charbon Ardent.


•••  la 3è A cherche, elle, la poésie dans les noms des villes de France avec le projet d'envoi postal :
dans un bottin, un atlas, sur internet, chercher des communes dont le nom fait écho à la Guerre
dans un plan de cette ville, trouver un nom de rue qui prolonge cet écho
à cette adresse poétiquement réelle, envoyer un courrier à mon nom,
attendre que l'enveloppe vous revienne,
mon nom retourné
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Un premier groupe cherche sur wikipédia les noms de toutes les communes de France. On repère celles dont le nom évoque quelque chose de la Guerre en général. On cherche ensuite sur googlemaps des noms de rue de cette ville qui font aussi penser à la guerre. Et on écrit à mon nom, ce nom générique où chacun peut se reconnaître.
Un deuxième groupe crée un timbre spécialement pour cet envoi : après plusieurs essais photographiques, la photo de la plaque rue des poilus est choisie pour illustrer un timbre spécial que l'on commande sur le site internet de La Poste.
Un dernier groupe prépare les enveloppes et le graphisme. On choisit de travailler avec des décalcomanies de lettres.
Le mardi 14 octobre nos enveloppes-poèmes sont officiellement postées. Au dos des enveloppes a été écrite l'adresse du Collège Léo Larguier pour que ces envois postaux voyagent, cherchent leurs destinataires puis nous reviennent à La Grand Combe : mon nom retourné






•••   la 6è B entame aussi son approche picturale :
peindre le flou
À partir de photos types de monuments aux morts de France, floutées grâce à photoshop, les collégiens doivent inventer et mettre à jour les éléments qui pourraient appartenir à la photo originale... Une autre manière d'aiguiser nos regards et nos imaginaires sur les codes et les signes présents sur les monuments commémoratifs.
Une sélection de ces dessins sera aussi exposée lors de l'exposition-installation finale du 6 décembre dans la salle du conseil de la mairie de la Grand Combe, durant le festival Charbon Ardent.


puis la classe se prépare ensuite pour une mission très particulière :
la cérémonie du 11 novembre
Pour cette cérémonie 2014, la 6è B a en effet été choisie pour être présente lors de la cérémonie et sera responsable de la lecture des noms des soldats morts à la guerre en 1914.
On se prépare respectueusement et on cherche une mise en scène simple et poétique pour partager ce moment important d'une cérémonie commémorative : dire à voix haute le nom des morts à la guerre.


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novembre-décembre 2014 : exposer la démarche 
Novembre est le mois de la réalisation des premiers événements publics de la résidence, mais aussi celui où se prépare l'exposition finale prévue lors des fêtes de la Sainte-Barbe le 6 décembre.

Il commence avec l'émission de Radio Grille Ouverte Sur la route des ondes. Les journalistes Cathy Rouveyrol et Yves Defago étaient venus rendre visite aux collégiens au mois d'octobre et ont construit un reportage radiophonique mêlant entretiens et oeuvres sonores de Sabine Macher :

  à écouter ici


Le 8 novembre a lieu le premier événement public de cette résidence. Les artistes Julien Quartier et Laurent Pichaud écrivent une conférence performée pour le site de la Maison du Mineur de la Grand Combe. Cette conférence permet d'alterner temps de conférences durant lesquels sont évoquées les œuvres de trois artistes contemporains qui explorent la question de la mémoire et de l'histoire :

• Jochen Gerz, à travers la question de l'invisibilité,
tel son Monument invisible de Sarrebrück



• Christian Boltanski, avec l'usage des vêtements,
ex : terril de la Monumenta, Paris



• et Wilfredo Prieto, en modifiant le statut des drapeaux nationaux passés
en noir et blanc dans son œuvre apolitique (2001)



Ces trois artistes ont été choisis en connivence avec des éléments constitutifs de la Maison des Mineurs : le sous-sol, la salle dite des pendus où les mineurs suspendaient leurs vêtements avant de descendre à la mine, les bannières-drapeaux, et ont permis de créer des séquences chorégraphiques, musicales et plastiques in situ pour évoquer la mémoire des mineurs morts à la guerre.



•••   le 11 novembre, deuxième événement public, les élèves de 6è B lisent les noms des morts à la guerre de l'année 2014 lors de la cérémonie généreusement mise en scène par Nicolas Casado, adjoint aux anciens combattants de la municipalité de la Grand Combe.

•••   le 14 novembre, le vidéaste Thomas Bernardet est présent pour tourner avec les élèves l'expérience de l'effort de mémoire. Prévu à côté du monument aux morts de la Grand Combe, le tournage a finalement lieu dans un espace de la Maison du Mineur. La vidéo sera exposée dans la salle du conseil de la Mairie de a Grand Combe le 6 décembre.




•••   le 18 novembre, Cécile Namur organise un atelier spécial de culture chorégraphique :
danse et guerre




2 décembre 2014 :  une fin
Cécile Namur et Laurent Pichaud viennent finir le cycle de rencontres hebdomadaires avec les collégiens. Une séance spéciale est organisée avec chacune des classes lors de laquelle les élèves peuvent écouter ensemble les œuvres sonores de Sabine Macher, regarder la vidéo de l'effort de mémoire et recevoir en avant première le poster-programme qui sera distribué pour les visiteurs de l'exposition du 6 décembre.


•••    un 6 décembre :